Hésiode, Les travaux et les jours, v.202-224

 

Νῦν δ' αἶνον βασιλεῦσιν ἐρέω φρονέουσι καὶ αὐτοῖς·

ὧδ' ἴρηξ προσέειπεν ἀηδόνα ποικιλόδειρον

ὕψι μάλ' ἐν νεφέεσσι φέρων ὀνύχεσσι μεμαρπώς·

205 ἣ δ' ἐλεόν, γναμπτοῖσι πεπαρμένη ἀμφ' ὀνύχεσσι,

μύρετο· τὴν ὅγ' ἐπικρατέως πρὸς μῦθον ἔειπεν·

“Δαιμονίη, τί λέληκας; ἔχει νύ σε πολλὸν ἀρείων·

τῇ δ' εἶς, ᾗ σ' ἂν ἐγώ περ ἄγω καὶ ἀοιδὸν ἐοῦσαν·

δεῖπνον δ', αἴ κ' ἐθέλω, ποιήσομαι ἠὲ μεθήσω.

210 ἄφρων δ', ὅς κ' ἐθέλῃ πρὸς κρείσσονας ἀντιφερίζειν·

νίκης τε στέρεται πρός τ' αἴσχεσιν ἄλγεα πάσχει.”

Ὣς ἔφατ' ὠκυπέτης ἴρηξ, τανυσίπτερος ὄρνις.

Ὦ Πέρση, σὺ δ' ἄκουε δίκης, μηδ' ὕϐριν ὄφελλε·

ὕϐρις γάρ τε κακὴ δειλῷ βροτῷ· οὐδὲ μὲν ἐσθλὸς

215 ῥηιδίως φερέμεν δύναται, βαρύθει δέ θ' ὑπ' αὐτῆς

ἐγκύρσας ἄτῃσιν· ὁδὸς δ' ἑτέρηφι παρελθεῖν

κρείσσων ἐς τὰ δίκαια· Δίκη δ' ὑπὲρ Ὕϐριος ἴσχει

ἐς τέλος ἐξελθοῦσα· παθὼν δέ τε νήπιος ἔγνω.

αὐτίκα γὰρ τρέχει Ὅρκος ἅμα σκολιῇσι δίκῃσιν.

220 τῆς δὲ Δίκης ῥόθος ἑλκομένης, ᾗ κ' ἄνδρες ἄγωσι

δωροφάγοι, σκολιῇς δὲ δίκῃς κρίνωσι θέμιστας.

ἣ δ' ἕπεται κλαίουσα πόλιν καὶ ἤθεα λαῶν,

ἠέρα ἑσσαμένη, κακὸν ἀνθρώποισι φέρουσα,

οἵ τε μιν ἐξελάσωσι καὶ οὐκ ἰθεῖαν ἔνειμαν.

Maintenant je dirai aux rois une fable, même si eux aussi sont sensés. Voici comment l’épervier apostrophait le rossignol au gosier bigarré, l’emportant bien haut dans les nuages, après l’avoir saisi dans ses serres ; l’autre, pitoyablement, transpercé par les serres recourbées, se lamentait ; mais il lui adressa violemment cette parole : « Malheureux ! Qu’as-tu à crier ? Un bien plus fort que toi te tient ; tu iras où je te mènerai, tout chanteur que tu sois ; je ferai de toi, si je le veux, mon dîner, ou bien je te relâcherai. Insensé qui veut se mesurer à de plus forts : il est privé de la victoire, et en plus de la honte il subit des souffrances ».

Ainsi parla l'épervier au vol rapide, oiseau aux ailes étendues. O Persès ! Toi, écoute la justice, et ne fais pas grossir la démesure ; car la démesure est mauvaise pour le pauvre mortel ; et l’homme de bien ne peut la supporter facilement, il est accablé sous son poids, quand par malheur il tombe dessus ; il y a une autre voie, meilleure, pour la contourner, menant à la justice. La Justice, arrivée à la fin, est plus forte que la Démesure ; et l’imbécile apprend à ses dépens. Car aussitôt accourt le Serment avec les jugements tortueux. Et c’est le hurlement de la Justice qu’on entraîne, là où la mènent les hommes dévoreurs de présents, et qui rendent leurs verdicts par des jugements tortueux. Elle, elle suit, pleurant sur les cités et les demeures des gens, vêtue de brume, apportant le mal aux hommes qui l’ont chassée et ne l’ont pas traitée avec droiture.

 

 

 

 


Hésiode, Les travaux et les jours, v.225-247

 

225 οἳ δὲ δίκας ξείνοισι καὶ ἐνδήμοισι διδοῦσιν

ἰθείας καὶ μή τι παρεκϐαίνουσι δικαίου,

τοῖσι τέθηλε πόλις, λαοὶ δ' ἀνθεῦσιν ἐν αὐτῇ·

εἰρήνη δ' ἀνὰ γῆν κουροτρόφος, οὐδέ ποτ' αὐτοῖς

ἀργαλέον πόλεμον τεκμαίρεται εὐρύοπα Ζεύς·

230 οὐδέ ποτ' ἰθυδίκῃσι μετ' ἀνδράσι λιμὸς ὀπηδεῖ

οὐδ' ἄτη, θαλίῃς δὲ μεμηλότα ἔργα νέμονται.

τοῖσι φέρει μὲν γαῖα πολὺν βίον, οὔρεσι δὲ δρῦς

ἄκρη μέν τε φέρει βαλάνους, μέσση δὲ μελίσσας·

εἰροπόκοι δ' ὄιες μαλλοῖς καταϐεϐρίθασιν·

235 τίκτουσιν δὲ γυναῖκες ἐοικότα τέκνα γονεῦσιν·

θάλλουσιν δ' ἀγαθοῖσι διαμπερές· οὐδ' ἐπὶ νηῶν

νίσσονται, καρπὸν δὲ φέρει ζείδωρος ἄρουρα.

οἷς δ' ὕϐρις τε μέμηλε κακὴ καὶ σχέτλια ἔργα,

τοῖς δὲ δίκην Κρονίδης τεκμαίρεται εὐρύοπα Ζεύς.

240 πολλάκι καὶ ξύμπασα πόλις κακοῦ ἀνδρὸς ἀπηύρα,

ὅς κεν ἀλιτραίνῃ καὶ ἀτάσθαλα μηχανάαται.

τοῖσιν δ' οὐρανόθεν μέγ' ἐπήγαγε πῆμα Κρονίων

λιμὸν ὁμοῦ καὶ λοιμόν· ἀποφθινύθουσι δὲ λαοί.

οὐδὲ γυναῖκες τίκτουσιν, μινύθουσι δὲ οἶκοι

245 Ζηνὸς φραδμοσύνῃσιν Ὀλυμπίου· ἄλλοτε δ' αὖτε

ἢ τῶν γε στρατὸν εὐρὺν ἀπώλεσεν ἢ ὅ γε τεῖχος

ἢ νέας ἐν πόντῳ Κρονίδης ἀποαίνυται αὐτῶν.

Mais ceux qui, aux étrangers et à leurs concitoyens, rendent des jugements droits et ne dévient aucunement de la justice, ceux-là leur cité est florissante, et les gens s’y épanouissent ; la paix, nourricière des jeunes hommes, s’étend sur leur terre, et jamais Zeus au vaste regard ne leur assigne la guerre douloureuse ; et jamais la famine ne talonne les hommes à la justice droite, ni la calamité, et dans les festins ils se partagent les fruits des travaux auxquels ils ont donné leurs soins ; la terre leur procure des vivres abondants, et dans les montagnes le chêne à son sommet porte des glands, et des abeilles en son milieu ; leurs moutons à l’épaisse toison sont accablés par le poids de leur laine ; les femmes enfantent des enfants semblables à leurs parents ; ils s’épanouissent sans cesse au milieu des biens ; et ils ne voyagent pas sur des navires, et le labour fertile apporte son fruit. Mais ceux qui se préoccupent de la démesure mauvaise et des actions méchantes, à ceux-là le fils de Kronos, Zeus au vaste regard, assigne une condamnation. Souvent toute une ville aussi prend à cause d’un homme mauvais qui se fourvoie et machine des folies. Sur eux, du haut du ciel, le fils de Kronos envoie un grand malheur, la famine en même temps que la peste ; et périssent les gens. Et les femmes n’enfantent plus, et s’étiolent les maisons par la sagesse de Zeus Olympien ; et de temps à autre soit le fils de Kronos leur détruit une vaste armée, soit une muraille, soit engloutit leurs navires dans la mer.

 

 

 

Hésiode, Les travaux et les jours, v.202-247

 

Ce passage se situe après l’évocation des deux sortes de luttes (bonne et mauvaise), le mythe de Pandore et le mythe des races. Il est la conclusion des réflexions d’Hésiode sur la Justice, préliminaire à la partie sur le Travail. Comme souvent dans la poésie archaïque grecque, le poète adopte une composition cyclique, en répétant la même séquence, la même idée sous différentes formes. Ainsi, après un apologue (v.202-212), Hésiode va avoir recours à des allégories (v.213-224), puis reprendre l’évocation de l’humanité de la même façon que dans le mythe des races, substituant à une présentation diachronique (= mythe des races) une présentation synchronique qui décrit l’humanité juste (= âge d’or) à laquelle s’oppose l’humanité hubristique (= âge de fer).

 

1) Un apologue (v.202-212) :

L’apologue (αἶνον) fait coïncider l’ϐρις du faucon (ἴρηξ) et celle des rois (βασιλεῦσιν) « mangeurs de présents », tandis que la victime du rapace, le rossignol (ἀηδόνα) désigne l’aède lui-même (καὶ ἀοιδὸν ἐοῦσαν·), ce que confirme le qualificatif ποικιλόδειρον, littéralement « dont le gosier est varié », c’est-à-dire « dont les chants sont variés », ce qui correspond aux différents registres d’Hésiode qui pratique aussi bien la poésie épique (Théogonie) que didactique (Les travaux et les jours).

Les serres du faucon rappellent par leur courbures (γναμπτοῖσι ὀνύχεσσι) la thématique récurrente dans le texte de la justice courbe (v.221 σκολιῇς δίκῃς). Le faucon par son arrogance et sa violence renvoie au type de paroles prononcées dans l’Iliade par les guerriers (Δαιμονίη, τί λέληκας; ἔχει νύ σε πολλὸν ἀρείων). De même l’adjectif ὠκυπέτης est une allusion à Achille « aux pieds rapides » dans l’Iliade. Ainsi le faucon manifeste une ϐρις qui n’utilise que la mauvaise lutte.

 

2) Les allégories (v.213-224) :

A cette ϐρις négative Hésiode oppose donc immédiatement son contraire positif, la δίκη ( Πέρση, σὺ δ' ἄκουε δίκης, μηδ' ϐριν ὄφελλε). La métaphore de l’homme alourdi par l’ϐρις (βαρύθει δέ θ' ὑπ' αὐτῆς) définit clairement l’ϐρις comme un excès que l’homme de bien (ἐσθλὸς) ne peut pas supporter et qui lui est étranger : on ne sombre dans la démesure que parce qu’on tombe dessus (ἐγκύρσας) et cela à cause des actes d’égarement (ἄτῃσιν avec un pluriel concrétisant) dont les dieux nous donnent l’occasion. L’homme est toujours libre de refuser cette démesure funeste. Ainsi il y a deux manières de revenir à la δίκη, soit activement par choix raisonné (ὁδὸς δ' ἑτέρηφι παρελθεῖν  / κρείσσων ἐς τὰ δίκαια), soit passivement en subissant comme un sot (παθὼν δέ τε νήπιος ἔγνω).

La lutte du Bien et du Mal est alors évoquée à l’aide d’allégories, dans une sorte de théomachie qui inverse la situation de l’apologue du faucon et du rossignol (Δίκη δ' ὑπὲρ ϐριος ἴσχει). Le Serment (Ὅρκος) est fils d’Eris[1], la Lutte (Théogonie v.231) : en ce sens Ὅρκος est le mauvais côté de la Δίκη, il correspond à la mauvaise Eris, comme Δίκη correspond à la bonne Eris.

L’image de Δίκη entraînée violemment par les hommes mangeurs de présents (δωροφάγοι) et aux jugements tordus (σκολιῇς δὲ δίκῃς κρίνωσι θέμιστας) est un écho de l’apologue où le faucon emporte de rossignol là où il veut (τῇ δ' εἶς, σ' ἂν ἐγώ περ ἄγω). L’image de Δίκη quittant les villes des hommes vêtue de brume renvoie clairement à la fin du mythe des races, quand la race de fer a mis le comble à ses crimes[2]. Hésiode brandit donc devant son frère Persès la menace d’un retour au chaos : la réalité présente rejoint ainsi le mythe.

 

3) L’humanité juste (= âge d’or) :

Logiquement, Hésiode va donc opposer à cette vision négative de la race de fer, une évocation positive de l’humanité qui rappelle par bien des aspects la race d’or[3]. Les notions de droiture et de justice (οἳ δὲ δίκας ξείνοισι καὶ ἐνδήμοισι διδοῦσιν / ἰθείας καὶ μή τι παρεκϐαίνουσι δικαίου,) sont immédiatement reliées à l’évocation d’une sorte d’âge d’or où les biens arrivent naturellement, d’où la métaphore filée de la floraison de l’humanité (τοῖσι τέθηλε πόλις, λαοὶ δ' ἀνθεῦσιν ἐν αὐτῇ· / εἰρήνη δ' ἀνὰ γῆν κουροτρόφοςθάλλουσιν). On notera l’absence de la faim (λιμὸς) et de l’égarement (ἄτη) qui étaient justement les enfants de la mauvaise Eris dans la Théogonie. A l’inverse des hommes de la race de fer qui étaient condamnés à cultiver la terre péniblement, ici la terre offre spontanément ses richesses (τοῖσι φέρει μὲν γαῖα πολὺν βίον) : les glands (qui étaient consommés, surtout en cas de disette en hiver), le miel (symbole récurrent de la douceur de vivre), la laine des moutons (qui protègera du froid : Hésiode insiste à plusieurs reprises sur le froid qui règne à Ascra). Enfin, à l’inverse de la race de fer[4], les femmes enfantent des enfants qui ressemblent à leur parents (τίκτουσιν δὲ γυναῖκες ἐοικότα τέκνα γονεῦσιν). La formule καρπὸν δὲ φέρει ζείδωρος ἄρουρα est une citation de l’âge d’or : elle est explicative, l’homme n’a pas à risquer sa vie en mer pour faire du commerce (οὐδ' ἐπὶ νηῶν  νίσσονται), puisque la terre lui donne la vie.

 

4) L’humanité hubristique (= âge de fer) :

Corrélativement les hommes dépourvus de justice sont associés par intertextualité à la deuxième et dernière période de l’âge de fer. Le contraste avec l’humanité juste est souligné avec insistance : les uns sont épargnés par Zeus (οὐδέ ποτ' αὐτοῖς / ἀργαλέον πόλεμον τεκμαίρεται εὐρύοπα Ζεύς), les autres sont punis par Zeus (τοῖς δὲ δίκην Κρονίδης τεκμαίρεται εὐρύοπα Ζεύς). A ceux qui ne respectent pas la justice (δίκη) Zeus en retour inflige un châtiment (δίκην). L’idée que la faute d’un seul contamine un groupe entier renvoie évidemment au début de l’Iliade (déjà évoquée par la guerre que Zeus n’envoie pas aux gens de bien), d’où l’aspect double du πῆμα envoyé par Zeus : la peste, fléau actif (λοιμόν) et la famine (λιμὸν) qui est l’inverse de l’évocation de l’humanité juste. La mort (ἀποφθινύθουσι δὲ λαοί) est complétée par la stérilité des femmes (οὐδὲ γυναῖκες τίκτουσιν). L’ϐρις, qui était déjà associée au monde de la guerre avec l’apologue du faucon et du rossignol, est ici évoquée à l’aide de deux formules parallèles introduites par  : la première renvoie à l’Iliade avec les Achéens (τῶν γε στρατὸν εὐρὺν ἀπώλεσεν) et les Troyens ( γε τεῖχος), la deuxième renvoie à la tradition littéraire des Νόστοι dont le plus célèbre est l’Odyssée ( νέας ἐν πόντῳ Κρονίδης ἀποαίνυται αὐτῶν).

 

Conclusion :

Hésiode élabore ainsi peu à peu un système très cohérent et dichotomique, tant par la composition du poème que par les réseaux sémantiques qu’il établit. D’une part, tout ce qui est positif correspond à la justice et à la prospérité civile ; d’autre part, ce qui est négatif renvoie à l’ϐρις dont l’aède montre les ravages, tant sur le plan civil que militaire.

Mais c’est aussi une réflexion sur l’art poétique lui-même : Hésiode veut rompre avec le modèle de l’épopée homérique (qui exalte les vertus guerrières) pour lui substituer une poésie didactique (qui chante le mérite du labeur agricole). Les auteurs tardifs de La dispute d’Homère et d’Hésiode ne s’y sont pas trompés : Homère s’oppose à Hésiode pour savoir s’il faut préférer la poésie didactique ou la poésie épique. Au terme du tournoi, Hésiode l’emporte, parce qu’il célèbre la paix et non la guerre.

 


 

 

 

 



[1] « «La Nuit funeste conçut encore Némésis, ce fléau des mortels, puis la Fraude, l'Amour criminel, la triste Vieillesse, Éris au cœur opiniâtre. L'odieuse Éris fit naître à son tour le Travail importun, l'Oubli, la Faim, les Douleurs qui font pleurer, les Disputes, les Meurtres, les Guerres, le Carnage, les Querelles, les Discours mensongers, les Contestations, le Mépris des lois et Até, ce couple inséparable, enfin Horkos, si fatal aux habitans de la terre quand l'un d'eux se parjure volontairement. » (Théogonie v.226-232).

[2] « Le père ne sera plus uni à son fils, ni le fils à son père, ni l'hôte à son hôte, ni l'ami à son ami ; le frère, comme auparavant, ne sera plus chéri de son frère ; les enfants mépriseront la vieillesse de leurs parents. Les cruels ! ils les accableront d'injurieux reproches sans redouter la vengeance divine. Dans leur coupable brutalité, ils ne rendront pas à leurs pères les soins que leur enfance aura reçus : l'un ravagera la cité de l'autre ; on ne respectera ni la foi des serments, ni la justice, ni la vertu ; on honorera de préférence l'homme vicieux et insolent ; l'équité et la pudeur ne seront plus en usage ; le méchant outragera le mortel vertueux par des discours pleins d'astuce auxquels il joindra le parjure. L'Envie au visage odieux, ce monstre qui répand la calomnie et se réjouit du mal, poursuivra sans relâche les hommes infortunés. Alors, promptes à fuir la terre immense pour l'Olympe, la Pudeur et Némésis, enveloppant leurs corps gracieux de leurs robes blanches, s'envoleront vers les célestes tribus et abandonneront les humains. » (v.182-200).

[3] « Quand les hommes et les dieux furent nés ensemble, d’abord les célestes habitants de l'Olympe créèrent la race d'or pour les mortels doués de la parole. Sous le règne de Kronos qui commandait dans le ciel, les mortels vivaient comme les dieux, ils étaient libres d'inquiétudes, de travaux et de souffrances ; la cruelle vieillesse ne les affligeait point ; leurs pieds et leurs mains conservaient sans cesse la même vigueur, et loin de tous les maux, ils se réjouissaient au milieu des festins, riches en fruits délicieux et chers aux bienheureux Immortels. Ils mouraient comme enchaînés par un doux sommeil. Tous les biens naissaient autour d'eux. La terre fertile produisait d'elle-même d'abondants trésors ; libres et paisibles, ils partageaient leurs richesses avec une foule de vertueux amis. Quand la terre eut renfermé dans son sein cette première génération, ces hommes, appelés les génies terrestres, devinrent les protecteurs et les gardiens tutélaires des mortels : ils observent leurs bonnes ou leurs mauvaises actions, et, enveloppés d'un nuage, parcourent toute la terre en répandant la richesse : telle est la royale prérogative qu'ils ont obtenue. » (v.109-119)

[4]  οὐδὲ πατὴρ παίδεσσιν ὁμοίιος οὐδέ τι παῖδες, « et le père ne sera plus semblable à ses enfants, ni les enfants à leur père » Les travaux et les jours, v.182.